« L’herbe qui pousse après le feu a l’odeur de fumée » dit le proverbe indien. Que reste-t-il d’une crise, lorsque le brouhaha de la vie a emporté l’urgence et l’attention un peu plus loin ? Il reste l’odeur de fumée… et cela ramène la crise à ce qu’elle n’est pas -un événement, unique et inscrit dans le temps. Le phénomène de crise, par ses relais et son impact réputationnel, constitue bien plus un élément pérenne du quotidien qu’un épisode à surmonter.
La résilience à la crise ne tient donc pas dans la capacité à dépasser celle-ci et construire un nouveau « normal », dans l’oubli -ou la recherche de l’oubli- du passé. Elle tient dans le « vivre avec ». Ce que les personnes atteintes de pathologies chroniques connaissent -hélas- si bien ! Gérer l’après-crise, c’est apprendre à maitriser un temps long qui a « l’odeur de fumée ». C’est accepter cette part d’identité nouvelle qui s’agrège à des années de construction probablement guidées par une autre vision. C’est, au final, accepter une forme de vulnérabilité qui ressemble à ce morceau de sparadrap dont le capitaine Haddock ne parvient pas à se débarrasser…
« Vivre avec », cela implique d’être préparé aux retours impromptus du passé. Une approche existentialiste de la crise consiste donc à assumer son empreinte comme faisant partie de son identité mais aussi à la surmonter par un réflexe de liberté et de résilience. Les techniques qui nous permettent de pondérer l'importance relative des événements et de passer facilement d'un sujet à l'autre s'avèrent ici utiles.
Toute crise constitue un marronnier dont les racines -nous le savons depuis Jean-Paul Sartre- sont porteuses de nausée. Bienheureux celui qui croit à son propre oubli.